Fantasia 2016 — Operation Avalanche

Et si l’alunissage de 1969 avait été en réalité filmé par des agents de la CIA dans le plus grand secret ? Et si les découvertes d’une équipe infiltrée avaient mené à l’un des plus grands complots de l’histoire moderne ?

Jp Valery
VYSUAL MAG

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En ce moment, le Festival Fantasia bat son plein à Montréal. Pendant près de 3 semaines, ce sont des dizaines de films qui sont projetés tous les jours — et VYSUAL est là pour couvrir cette 20e édition.
Bien que l’idée de passer mes journées à manger du pop-corn dans des salles obscures soit enivrante, je suis malheureusement obligé de faire une sélection et je ne peux assister qu’à une partie des projections (Il faut bien travailler à côté…). Aujourd’hui je vous présente un film qui m’a beaucoup plu et dont la réalisation est une belle leçon de cinéma : Operation Avalanche.

Operation Avalanche est le second film de Matt Johnson, qu’on avait déjà vu en 2013 aux manettes de The Dirties. Il nous plonge littéralement dans les années 60 et dans la course à l’espace de la Guerre Froide dans ce found-footage.

Matt Johnson est un agent de la CIA passionné de cinéma. Alors que sa hiérarchie cherche à infiltrer la NASA à la recherche d’un agent-double, il persuade les grands pontes de l’agence de renseignement de l’envoyer avec ses collègues comme une fausse équipe de documentaire. Il ne se doute alors pas du tout des découvertes qu’ils vont faire. Ni que cela donnera naissance au plus grand complot de l’histoire moderne

Friand des théories du complot, le synopsis d’Operation Avalanche m’avait particulièrement séduit. Et force est de constater que le film tient ses promesses, mais peut-être pas pour les raisons auxquelles vous pensez. Vous pouvez passer outre le prochain paragraphe sur les défauts du long-métrage et lire directement pourquoi ce film est génial après.

Commençons par les deux principaux (voir seuls) défauts du film : les mouvements de caméra des 20 premières minutes et la fin qui laisse une sensation d’inachevé. En effet, filmé à l’épaule, les premières minutes du film ont été une certaine épreuve à traverser. Je ne suis pas sujet au mal des transports, mais je dois concéder que je n’étais vraiment pas à l’aise. C’est dommage et pas vraiment excusable car cela n’apporte rien au propos, ni n’est vraiment justifié dans la diégèse du film. Également cette fin qui semble ne pas vraiment en être une. Une dizaine de minutes qui semblent bâclées comparé au reste du film, et c’est bien dommage car ce reste est justement très bon.

Ceci étant dit, Operation Avalanche est vraiment exceptionnel par bien des aspects. En effet le Q&R post projection avec l’équipe du film a permis de voir le film sous un angle complètement différent; et c’est d’ailleurs l’un des meilleurs Q&R auxquels j’ai pu assister.

Tout d’abord d’un point de vue technique. En effet, le film était présenté comme un documentaire réalisé par les personnages. On avait donc une photographie vintage, clairement typée années 60. Et ce n’est pas un effet basique logiciel. Non. L’équipe du film a évidemment filmé en numérique sur des caméras Black Magic, mais le film a ensuite été imprimé image par image sur du film argentique 16mm. L’effet de film n’est donc pas simulé mais bien réel. Ce qui permet également une mise en abîme assez folle dans une scène où nous voyons Matt Johnson monter des pellicules, qui sont en fait le film que nous regardons présentement. Assez meta, et un premier coup de chapeau à tirer.
Dans la même lignée, le responsable des effets spéciaux était présent (et incroyablement modeste) et racontait comment ils avaient réussi à faire une scène entière avec Stanley Kubrick juste en animant les quelques rares photos de tournage de 2001… L’incrustation des acteurs était évidente, mais on reste ébahi d’apprendre que le médium de base était en fait une poignée de photos. Un exemple parmi tant d’autres pour un deuxième coup de chapeau.

Ensuite d’un point de vue réalisation. Une série d’histoires d’ailleurs assez incroyables. En effet, l’équipe confiait que les scènes tournées au sein des bureaux de la NASA à Houston avaient été faites en douce. L’équipe se faisant passer pour des étudiants en cinéma canadiens réalisant un documentaire sur les années 60 — tout en filmant en cachette leur film. Donc infiltrés sous un faux prétexte de documentaire… Ce qui est un peu l’histoire du film… Une prouesse très méta qui mérite d’être saluée. D’autant plus qu’apparemment infiltrer la NASA n’était pas suffisant, et qu’ils ont remis ça à Londres dans les studios historiques de Stanley Kubrick (avant de se faire chasser par la sécurité du tournage d’Avengers mais c’est une autre histoire).
Ou bien encore ce plan séquence de poursuite en voiture de plusieurs minutes. Une scène qui aurait coûte peu ou prou un million de dollars dans une production “traditionnelle”; montant qui s’explique par des questions d’assurance, de fermeture de voies à la circulation, de remorquage de véhicules, etc… Mais dans le cas présent, c’est bien l’acteur/réalisateur Matt Johnson qui conduit le véhicule tout en se faisant tirer dessus. Et l’acteur caméraman est sur la plage arrière pour capturer cela. Une prise de risque payante tant cette scène est immersive.

C’est d’ailleurs toutes ces anecdotes qui permettent d’apprécier encore plus l’oeuvre de Matt Johnson et sa bande. Un hommage à la fois à une époque technologique lointaine, mais aussi aux films d’espionnages de cette époque historique, et enfin à cette époque moderne des home movies.

Je ne pense pas qu’il faille le prendre au premier degré pour l’apprécier pleinement. Mais c’est à mon humble avis un film à voir pour toutes les prouesses évoquées ci-dessus (et malgré ses deux défauts majeurs).

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